Asal Abasian : Être queer en Iran
La journaliste féministe queer Asal Abasian, 32 ans, a longtemps milité pour l’égalité des sexes et de genres dans la théocratie iranienne. Face aux menaces des forces de sécurité, elle a dû se rendre en Turquie. Elle a été accueillie en France en 2023, dans le cadre de l’Initiative Marianne pour les droits humains, et elle y réside désormais, poursuivant son combat. Nous l’avons rencontrée.
Qui êtes-vous ?
Je suis une féministe et une journaliste queer iranienne. Mais qui suis-je au fond ? C'est une question existentielle difficile. J’y pense tous les jours depuis mon enfance, et j’ai toujours du mal à y répondre ! Je peux simplement dire que je fais de mon mieux pour devenir un humain responsable. En tant que journaliste, je voudrais être la voix des sans-voix. En tant que féministe queer, je m'efforce de me révolter contre les clichés et les traditions patriarcales…
Comment la communauté LGBT en Iran fait-elle face au régime ?
La communauté LGBTQI+ en Iran est confrontée à des défis importants en raison de l'interprétation stricte de la loi islamique par le régime théocratique, qui criminalise les relations entre personnes de même sexe. Les personnes perçues comme faisant partie de la communauté LGBTQI+ sont victimes de discrimination, de harcèlement et même de violence de la part du gouvernement et de la société.
Malgré ces difficultés, la communauté LGBTQI+ en Iran fait preuve de résilience et d'ingéniosité pour trouver des moyens de faire face au régime oppressif. Certaines personnes choisissent de dissimuler leur orientation sexuelle ou leur identité de genre pour éviter les persécutions, tandis que d'autres recherchent le soutien de réseaux clandestins ou de communautés en ligne. Certains militants iraniens travaillent courageusement pour défendre les droits des personnes LGBTQI+, souvent au péril de leur vie. Ils s’engagent dans des campagnes de plaidoyer, fournissent des services de soutien ou travaillent à la sensibilisation aux questions LGBTQI+, tant au niveau national qu'international. Dans l'ensemble, malgré la répression et les risques encourus, les membres de cette communauté trouvent des moyens de se soutenir mutuellement et de plaider en faveur du changement.
La communauté queer s’est-elle bien intégrée aux manifestations « Femme, Vie, Liberté » depuis deux ans ?
Ces manifestations s'opposent au patriarcat, donc à l'homophobie. Elles peuvent susciter une prise de conscience collective de la misogynie. Les manifestations pour les droits des femmes en Iran ont donc permis d'aborder les questions liées à la communauté LGBTQI+, de manière indirecte. Si ces manifestations sont axées sur l'égalité des sexes, les demandes de justice, de liberté et de respect des droits de l'homme trouvent un écho dans les luttes de la communauté LGBTQI+. Certains militants des droits des femmes ont défendu les droits de tous les groupes marginalisés, y compris les queers. Toutes les discriminations doivent être traitées ensemble.
Pourquoi avez-vous choisi de vous installer en France ?
La Révolution française et les événements de mai 68 m'ont toujours inspirée. Nombre de mes féministes préférées étaient françaises ou francophones. J'envisageais la participation à l’Initiative Marianne comme une occasion cruciale d'élargir mon expérience dans un pays où les institutions civiles prospèrent. Et c'est ce qui s'est passé. Au cours des six mois qu'a duré le programme, et même au-delà en tant qu'ancienne élève, j'ai pu nouer des liens et collaborer avec de nombreuses organisations de défense des droits de l'homme, des droits féministes et des droits des LGBTQ. Ici, j’apprends et continue mon combat. Il est hélas loin d’être terminé.
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